Cinquante ans d'exil au service de la Sainte Russie: les soeurs Zernoff et leur réseau d'assistance aux enfants de l'émigration russe (1920-1970)

Cognome dell'autore
Justine
Reynaud
Tipo di ricerca
Tesi di master
Stato
abgeschlossen/terminé
Cognome del docente
Prof.
Jean-François
Fayet
Istituzione
Histoire contemporaine
Luogo
Fribourg
Anno
2023/2024
Abstract

Lorsqu’elles quittent Moscou pour le Caucase avec leur famille en novembre 1917, Sophie et Marie Zernoff espèrent encore que leur retraite dans le Sud ne sera que de courte durée. En réalité, c’est là le début d’un exil marqué par plus de cinquante années d’engagement communautaire, durant lesquelles ces deux soeurs de l’intelligentsia religieuse moscovite vont développer un réseau d’assistance pour soutenir les classes populaires de l’émigration russe parisienne et leurs enfants. La contribution des élites religieuses au système d’assistance de l’émigration russe restait un sujet peu étudié, de même que la famille Zernoff qui n’avait pas encore fait l’objet de recherches. Ce travail de mémoire s’inscrit donc dans l’historiographie de l’exil russe, en prenant pour objet d’étude les initiatives philanthropiques des soeurs Zernoff. L’objectif est d’analyser à travers le développement de leur réseau d’assistance aux enfants et ses adaptations, la façon dont les élites de l’émigration, ici religieuses, contribuent à consolider et faire perdurer l’idée d’un exil russe comme communauté hors des frontières de l’ancienne Russie.

À partir de l’analyse des archives personnelles des Zernoff, des papiers administratifs du Centre d’aide aux réfugiés russes, association fondée par Sophie Zernoff en 1934, et des archives de l’association suisse partenaire des Zernoff, à savoir le Comité d’aide aux enfants d’émigrés (SHEK), ce travail montre dans une perspective chronologique comment les soeurs Zernoff s’imposent progressivement comme des actrices de l’exil russe parisien. Des cercles religieux de l’Association Chrétienne des Étudiants Russes (ACER), où elles développent la conception de l’exil comme une « mission », dont l’enjeu est de faire vivre la Sainte Russie dans la vie quotidienne de l’émigration, Sophie et Marie Zernoff basculent dans le monde très organisé de l’assistance aux émigré·e·s parisien·ne·s. Elles tirent leur épingle du jeu en se déployant à l’international et en collaborant avec des organismes non-russes, notamment la SHEK en Suisse, grâce à laquelle elles placent 2300 enfants russes entre 1935 et 1939. À travers l’analyse de cette prise en charge, par les élites, des classes précarisées, ce travail souligne les disparités sociales de l’émigration russe et leurs conséquences sur la conception que partagent ces mêmes élites d’un exil fondé sur les valeurs de l’orthodoxie et de la culture « russe ». En « expertes » de l’émigration, les Zernoff conservent leur rôle dans la société russe exilée et espèrent inspirer aux enfants russes ses valeurs, s’assurant une relève capable de faire perdurer la « civilisation perdue » avec la révolution. La pérennité de ces réseaux religieux et la ténacité de Sophie Zernoff assurent la longévité de son association, qui continue ses activités jusqu’à la fin des années 1960, se substituant progressivement aux anciennes ressources d’aide aux émigré·e·s. L’ouverture de deux orphelinats en 1939, puis 1953, matérialise l’idée d’un exil devenu patrimoine, dont les enfants de l’émigration russe désormais « anachronique » deviennent les héritiers. Ce travail souligne enfin l’importance de la mémoire et les efforts des exilé·e·s dans la conservation de leurs propres archives, démarche particulière d’une émigration dont l’histoire est longtemps restée « dans l’ombre ».

Accesso al lavoro

Biblioteca

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