Adoptée en 1981 à l’unanimité des pays membres de l’Organisation de l’Unité africaine, la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples ou Charte de Banjul est à la fois une convention continentale, une déclaration panafricaniste et un important jalon dans la promotion d’un nouveau pacte international relatif aux droits de solidarité. La distinction de ces dimensions définit trois axes thématiques qui offrent une perspective nouvelle sur l’universalisation, l’universalité et l’évolution des droits humains dans la seconde partie du XXe siècle.
L’exploration de son processus d’adoption, de ses origines intellectuelles et politiques à son institutionnalisation, offre d’une part un regard décentré sur les mécanismes onusiens de diffusion du concept de droits humains, et permet d’autre part de sonder la réception d’un système de valeurs proclamé universel dans une aire culturelle d’échelle continentale.
L’analyse du contenu original de la Charte met quant-à-elle en évidence l’apport théorique des juristes africains au droit international des droits de l’Homme. Droits des peuples, au développement et à la paix; importance de la famille; mise en avant des devoirs des individus et des Etats: la Charte de Banjul revendique de nouveaux principes qui répondent au passé colonial et à la persistance de régimes discriminatoires, tout en renforçant la construction d’un sentiment d’unité continentale.
Enfin, le décryptage des liens entre la Charte africaine des droits l’homme et des peuples et la promotion d’une nouvelle génération de droits humains éclaire la mise en place de réseaux transnationaux qui se tissent entre l’Europe, l’Afrique et l’Amérique latine pour mieux peser sur l’ordre mondial. L’utilisation du concept de solidarité illustre par ailleurs l’instrumentalisation idéologique des droits humains et de leur rhétorique, dont la diffusion aboutit à leur affaiblissement plutôt qu’à leur renforcement.