Ce mémoire de master s’intéresse à l’isolement diplomatique traversé par la Confédération à la fin de la Deuxième Guerre mondiale et aux stratégies politiques mises en place pour en sortir, dont l’aide humanitaire est une composante centrale. L’angle d’analyse choisi est celui de l’action du Comité international de la Croix-Rouge. Bien que la neutralité et l’indépendance de l’organisation soit revendiquée dans ses statuts, nombre d’études historiques démontrent les liens entre la Confédération et le Comité ; aucune recherche ne s’est auparavant penchée sur le cas de l’après-guerre. Ce mémoire a donc pour ambition de questionner l’impact des actions du CICR en Autriche sur l’image de la neutralité suisse entachée par l’expérience de la Deuxième guerre mondiale.
Cette recherche répond ainsi à trois questions : quels facteurs poussent le CICR à intervenir en Autriche et quels en sont les avantages pour la Confédération ? – Comment les actions de secours du CICR se déroulent-elles en Autriche ? – Quel est le bilan de cette action de secours pour le CICR ainsi que pour la Suisse ?
Le dépouillement des archives a révélé de nombreux avantages à l’établissement de délégations en Autriche de par la présence simultanée des autorités américaines, britanniques, françaises, soviétiques et autrichiennes ; une aubaine diplomatique tant pour le CICR que la Confédération. Il est également dans l’intérêt des relations économiques helvétiques que ses plus proches voisins se reconstruisent rapidement après la guerre. Les sources utilisées permettent également de rendre compte de la diversité des secours organisés : assistance aux personnes réfugiées, à la population autrichienne, aux prisonniers de guerre « ennemis et alliés ». Alors que la situation humanitaire se stabilise à la fin des années 1940 et que les tâches traditionnelles du CICR ont été liquidées, Genève décide tout de même de conserver une délégation à Vienne afin de garantir des contacts étroits avec les pays de l’Est.
Finalement, l’action du CICR en Autriche révèle l’indissociabilité tacite entre le Comité et son pays d’origine qui provoque une assimilation instantanée de l’attitude du CICR à celle de la Suisse. Ainsi, le bon déroulement du travail des délégations établies en Autriche revalorise la réputation helvétique. Il ne faut cependant pas perdre de vue l’impact de la Guerre froide sur les relations internationales qui provoque une revalorisation du statut de neutre de la Suisse moins en raison de ses actions charitables que pour les intérêts occidentaux de pouvoir s’appuyer sur un îlot de neutralité au sein d’une Europe divisée en deux blocs idéologiques.