Ce travail présente une source inédite au public, le journal personnel et deux lettres d’Édouard VACHER, un Français vivant en Suisse et ayant quitté sa patrie d’adoption sans obligation réelle pour répondre à la mobilisation générale d’août 1914. Cet écrit vous permettra de découvrir les facteurs qui participent à l’acceptation, au refus et à l’endurance de la guerre et les différentes formes que ceux-ci prennent.
L’histoire de ces Français mobilisés, non-naturalisés, n’étant souvent pas nés ou n’ayant jamais vécu en France est un champ de recherche pratiquement inexploré. Après un an de guerre, Édouard VACHER ne retournera pas au front et est considéré comme déserteur à partir du 5 septembre 1915. Bien que le journal et la correspondance ne couvrent pas cette année dans son entier, ils nous permettent avec d’autres sources d’émettre quelques hypothèses sur les causes de ce refus. Là encore, les témoignages de ces Français de Suisse ayant décidé de ne pas repartir ont été très peu étudiés et chiffrés. Par cette source supplémentaire qui apporte des informations du terrain, ce mémoire tente d’apporter une modeste contribution à ce vide historiographique et de faire par la même mémoire de ces hommes et plus particulièrement de ce bisaïeul de l’auteur.
Cette documentation d’Édouard VACHER est interprétée et mise en parallèle dans une analyse comparative avec les carnets de Louis BARTHAS, un militant socialiste français. Une source étudiée par de nombreux historiens. Par cette méthode de mise en relation, le journal de BARTHAS vient appuyer et éclairer les écrits de VACHER et nous permettre d’extraire certains éléments clefs.
Après une première partie davantage historiographique et abordant les principaux concepts en lien avec l’acceptation et le refus de la guerre, nous analysons les sources matérielles, les témoins et recherchons les motivations des deux diaristes à rédiger leurs journaux. La partie principale de ce travail tente de saisir par les écrits ce qui a fait tenir les soldats en dépassant le clivage entre l’« école du consentement » et l’ « école de la contrainte » par un nouveau trinôme « accepter-endurer-refuser ». Cette trichotomie est ainsi explorée à l’aune des cinq dimensions de la personne humaine (physique, affective, intellectuelle, sociale et spirituelle) afin d’offrir une approche incarnée de ces hommes pris dans un tourbillonnement de l’histoire.