Après quelques années en dents de scie, entre marche forcée des institutions de politique scientifique, manœuvres de détournement des grands éditeurs, et embarras des chercheurs, il semble que 2019 apporte son lot de bonnes nouvelles pour l'accès ouvert aux résultats de la recherche.
Premier développement intéressant en Suisse, l'initiative des collègues de l'Académie suisse des sciences humaines et sociales (ASSH) qui proposent de créer un fond de financement public pour financer le passage au libre accès des revues du domaine sans devoir recourir à des solutions boiteuses comme les frais de traitement d'article (APC) ou autres modèles hybrides. La solution permettrait d'aligner immédiatement nos disciplines aux exigences du Plan national open access, qui a fixé à 2024 la date butoir pour le passage intégral au libre accès. Nos voisins français ont récemment mis en ligne un baromètre de l'accès ouvert, qui offre un suivi transparent des progrès accomplis; peut-être un modèle à adapter en Suisse.
Au niveau européen, il existe également un grand projet dédié à la publication en libre accès en sciences humaines et sociales qui devrait bientôt porter ses fruits, OPERAS. Ce dernier prépare une infrastructure de publication pour les revues scientifiques, ainsi qu'un outil de découverte des contenus en libre accès.
Les outils de découverte des contenus ouverts sont un thème important. Aura-t-on réussi le pari de l'accès ouvert, si l'unique moyen de trouver les contenus disponibles est de s'en remettre à Google ? Des alternatives existent déjà, comme le très efficace Bielfied Academic Search Engine - qu'on ne saurait trop recommander - ou encore le nouveau portail OpenAire Explore.
L'accès ouvert aux résultats de la recherche est un champ foisonnant, non dépourvu de contradictions et de conflits d'intérêts. J'ai consacré un article récemment à l'analyse des dynamiques complexes autours de l'open access dans les sciences historiques: In Open Access’s Long Shadow – A view from the Humanities. J'en reproduis ici la citation finale:
“open access should be understood not as a homogeneous project striving to become a dominant model, nor as a concept with a pre-described meaning or ideology, but as a project with an unknown outcome engaged in a series of critical struggles. (...) We need to leave it open, open to otherness and difference, and open to adapt to different circumstances” (Adema 2014).