Cher blog infoclio.ch,
tout d'abord, excuse-moi de t'avoir négligé ces derniers mois. Je ne t'ai pas oublié, loin de là, mais d'une part j'étais occupé par le THATCamp Switzerland, et d'autre part - ne te vexe pas s'il te plaît - parfois tu m’embarrasses.
Tu m'embarrasses parce que je ne sais pas toujours ce que tu attends de moi. Quel genre de billets dois-je coucher sur tes pages digitales ? De quelle longueur ? Pour quel public ? Puis-je utiliser un ton familier ou faut-il que je reste formel ?
Ces questions ne sont pas nouvelles. Dès le début, notre relation a été compliquée. Elle a longuement évolué depuis. Rassures-toi, ceci n'est pas une lettre de rupture. Je voudrais simplement revenir sur les étapes de notre relation.
Lors de ta naissance, en 2009, nous avons voulu réunir autours de toi une série d'auteurs, historiens pour la plupart, habitués à écrire de longs textes de recherche et d'analyse. Mais tu n'as pas su bien les accueillir, ni leur donner la place qu'ils méritaient, et peu à peu ils se sont éloignés de toi.
En 2010, ce sont Philipp Ischer et moi qui sommes restés à ton chevet. Nous t'avons confié des nouvelles sur l'actualité de l'histoire, sur les nouvelles technologies pour la recherche, et sur les activités d'infoclio.ch. Pour un temps, la relation a assez bien fonctionné. Nous t'avons même consacré un workshop en 2010, sur le thème Histoire et web 2.0.
Cependant, lors d'une évaluation menée fin 2010, tu as été sévèrement critiqué. Tu n'avais pas rempli ta mission de réunir la communauté scientifique, ni celle d'être un faiseur d'opinion. Certains voulaient terminer ton existence. Plus que de l'hostilité, tu suscitais de la gêne. On ne savait plus quoi faire de toi.
Pour te sauver, j'ai minimisé ton importance. Ce n'est qu'une petite chose fragile qui ne dérange personne, laissez-le là où il est, ça ne mange pas de pain - ai-je répété à tes censeurs. Ainsi tu as pu continuer.
En 2011, des utilisateurs externes ont commencé à utiliser tes pages. L'un voulait faire connaître un cours de formation, un second présenter une nouvelle application, un troisième signaler une ressource, et ils venaient vers toi. La liste de tes auteurs s'est allongée jusqu'à compter une vingtaine de noms, pour notre commune satisfaction.
En 2012, la situation a évolué. Nous ne sommes pas seuls ici-bas; d'autres blogs se posent les mêmes questions que nous. Et proposent des solutions.
Le portail de blogs scientifiques hypotheses.org connaît les développements les plus intéressants. Il s'est doté d'un comité de rédaction pour garantir la qualité de ses contributions. Il a fait des démarches auprès des bibliothèques nationales pour doter les blogs de sa plateforme d'un ISSN, comme les "vraies" revues scientifiques. Un portail affilé de langue allemande est né, intitulé de.hypotheses.org, lui aussi avec un comité scientifique et un comité de rédaction, dont infoclio.ch fait partie. de.hypotheses.org tiendra son premier colloque le 9 mars à München. Et en attendant, une discussion sur la place des blogs dans la recherche fait rage sur les pages de la rédaction.
Ces portails de blogs scientifiques sont une étape importante pour valoriser les contributions en ligne. Le monde de la recherche se base sur l'autorité scientifique et la reconnaissance par les pairs. Pour que les chercheurs s'intéressent à ce nouveau type de format, il faut leur garantir une certaine crédibilité.
- Mais non tu n'es pas dépourvu de crédibilité, mon cher blog infoclio.ch ! C'est juste que tu ne poursuis pas les mêmes ambitions. Tu ne prétends pas être l'équivalent d'une revue, ni même d'un journal. Comme l'explique Pierre Mounier, directeur d'hypotheses.org, c'est aussi la diversité des blogs qui fait leur richesse.
Toi, tu es une plateforme d'expression libre. Tous les utilisateurs du site peuvent écrire sur tes pages. Tu réunis différents types de contributions: des annonces, des actualités, des commentaires. Certains billets sont longs, d'autres courts. N'aie jamais honte de ta nature hybride et vis sans complexe ta bohème numérique, on t'aime comme tu es.