Si la sauvegarde constitue l’un des piliers, avec la collecte et la valorisation, de toute institution en charge de collections patrimoniales, elle est toutefois plus rarement l’objet d’un discours analytique et réflexif dans sa perspective historique. Les études en muséologie, l’histoire des collections, voire l’histoire des sciences et des techniques permettent chacune, de leur point de vue respectif, d’approcher les enjeux de « pourquoi » et « comment » l’on conserve toute sorte de corpus matériels dans des lieux voués à leur pérennité. Les professionnel.les qui y officient ont eux-mêmes nombre d’interrogations sur l’état de leurs collections et sur l’origine de pratiques qu’ils.elles perpétuent dans leurs gestes quotidiens.
Ce sont pourtant plus fréquemment les questions liées à la collecte et au statut de l’objet, ainsi qu’au « comment montrer » et aux dispositifs d’exposition, qui ont eu les faveurs récentes du monde académique, comme des musées. Depuis deux décennies, cet auto-questionnement est devenu matière à expositions pour les institutions. Celles-ci intègrent désormais dans leur propos expographique les multiples identités, ainsi que le statut de certains objets ou ensembles de collections (et leur possible réassignation) en lien avec l’histoire de l’institution, sa constitution, la « charte » de ses valeurs et la formulation de ses pratiques. Quel est l’impact de ce regard renouvelé sur les pratiques de sauvegarde et le travail de ceux et celles qui conservent ?
Les recherches sur les modalités de constitution des collections ont mis en évidence la nature à la fois intentionnelle et contingente de leur émergence. Comment les phénomènes de la conservation s’articulent-ils donc et se perpétuent-ils depuis l’invention des institutions et la formalisation des métiers du patrimoine, que cela soit au sein de musées disciplinaires ou thématiques, de cabinets, mais également dans les bibliothèques et même les jardins botaniques ?
Dans le cadre du projet FNS « Bibliothèques et musées en Suisse », un colloque de deux journées sera consacré les 5 et 6 juin 2025 à toutes ces dimensions de la conservation de collections patrimoniales à travers les époques. Cet événement entend faire interagir les milieux académiques, scientifiques et les corps de métier, tout en offrant une opportunité de réflexion et des éclairages sur des études de cas. Il privilégiera une approche globale du phénomène, se focalisant essentiellement sur la période comprise entre le 17e et la fin du 19e siècle. Toutefois, les communications portant sur le 20e siècle seront les bienvenues si elles dialoguent avec le passé. L’évocation de ces dimensions est notamment envisagée au prisme des thèmes suivants :
- Trajectoires et typologies d’objets : redéfinitions et taxonomie ; fonctionnalité et instruments ; objets hybrides.
- L’esprit du lieu et la diversité des collections : cabinets, musées, bibliothèques, archives, jardins botaniques etc. ; les aléas de l’histoire matérielle : déménager, retrouver, recoter, etc.
- Les dispositifs de la conservation et le « spectacle de l’ordre » : contenants, vitrines, modes de rangement.
- Nomenclature(s).
- Inventaires, catalogues, « technologies de papier » : quand et pourquoi les inventaires et les catalogues sont-ils établis ? Quels sont les critères de classement adoptés ? Comment ces dispositifs ont-ils contribué à la conservation ?
- Histoire matérielle/dématérialisation : dispositifs numériques et bases de données.
- Théoriser la conservation : historiographie ; méthodes, sources et modèles ; traditions et stratégies novatrices.
- Individus et institutions : conservateur (un métier qui n’avait pas de nom) ; disciplines, professionnalisation ; le poids du politique ; l’organisation et l’évolution du service public.
- Perte, tri, destruction : les critères et les enjeux d’une conservation « en conscience ».
Les propositions, en français, en allemand, en italien ou en anglais comprendront environ 300 mots. Veuillez joindre à votre proposition un bref CV (1 à 2 pages). Elles sont à adresser à Valérie Kobi (valerie.kobi@unine.ch) et à Chonja Lee (chonja.lee@unine.ch). Délai pour l’envoi des propositions : 31 octobre 2024. Les réponses seront envoyées dans le courant du mois de novembre 2024.
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